Les blogs sur le cancer de la prostate mis en avant dans la presse



18 juillet 2013

Bruno Geoffroy est journaliste scientifique indépendant (http://www.vintagewebzine.net). Lauréat cette année d’une bourse en journalisme des Instituts de recherche en santé du Canada, il rédige actuellement des articles sur les futurs outils de dépistage du cancer de la prostate.
Ces reportages seront diffusés en novembre 2013 sur le site Web de l’Agence Science-Presse et de Protégez-Vous.
Pour l'un de ses articles sur les blogs tenus par des patients et leur maladie Bruno m’a contacté pour une interview.
Extrait de cet entretien à distance :

Pourquoi avoir choisi un tel titre pour votre blogue?
Le cancer n’est pas une maladie ordinaire, il vous accompagne 24h sur 24, ça devient un compagnon de route incontournable, on ne choisit pas toujours ses compagnons de voyage, pourtant, ils sont là et ne vous quittent pas. Nous vivons à trois maintenant dans notre couple et il faut bien l’accepter sans quoi c’est le couple, le vrai, qui prend des risques. Ce voyage pour quelques-uns restera un mauvais souvenir et pour d’autres sera le dernier. Ce n’est pas une métaphore littéraire, c’est très concrètement un cheminement avec des étapes, des moments de liberté et des obligations.

Comment vous est venue l'idée d'écrire un blogue sur et autour de la maladie?
Je suis gérant d’une entreprise qui développe et administre des sites Internet. J’ai une culture de la communication et du pouvoir des mots très importante. Ma première réaction quand j’ai appris mon cancer a été de lire tout ce que je pouvais trouver sur ce sujet vu que mes médecins ne répondaient pas à mes sollicitations. Aujourd’hui quand vous voulez vous informer, vous passez par Internet. Après avoir fait le tri des sites qui surfent sur les maladies pour diffuser de la pub ou d’autres messages, je me suis rendu compte que très peu de personnes communiquaient autour du cancer de la prostate. J’ai eu envie d’écrire pour raconter mon expérience, pour essayer de communiquer avec d’autres personnes qui me trouveraient par des recherches de mots clés. Au-delà de ça, j’ai toujours eu envie d’écrire.

À qui l'adressez-vous? 
Mes écrits s’adressent avant tout aux autres malades dans un but d’échanges et de soutien réciproque. Bien sûr, je me sers également de ce moyen de communication pour « régler des comptes » du moins pour exprimer ma colère et ma désapprobation vis-à-vis des réactions du corps médical qui trop souvent ne prend pas en compte le patient.

Y voyez-vous un moyen de parler autrement de la maladie (au-delà du discours médical)?
Le discours médical se veut rassurant et se limite à la gestion de la maladie. Un cancer va beaucoup plus loin dans l’intrusion du corps humain. J’ai voulu expliquer tout ce que pouvait ressentir un malade avec sa perte d’autonomie mais également toutes les douleurs mentales, causées par un manque flagrant d’information et de communication. Mes écrits n’engagent que moi et ma perception des choses qui n’est pas une règle en soit. Je tiens aussi à démystifier la maladie et c’est pour cette raison que j’essaye de mettre une note d’humour dans mes propos quand je peux me le permettre

De parler aux malades plutôt qu'à la maladie?
Oui, je veux parler aux malades, contrairement aux médecins qui ne parlent qu’à la maladie, mais en même temps je parle aussi un peu à mes cellules. Les malades se portent un regard entre eux qui est totalement différent du regard des médecins ou du regard externe. La confiance est de mise, beaucoup plus importante et plus viable quand vous obtenez des informations d’une personne qui a vécu ce qu’elle raconte. C’est toute la force d’internet, aujourd’hui très peu de personne font un choix sans s’informer des avis de consommateurs. Un traitement médical n’est pas un objet usuel quelconque évidement, mais du point de vue d’un malade, quand on pose des questions et qu’on ne trouve aucune réponse, l’angoisse se développe encore plus vite et les résultats seront moins efficaces. Le faible taux d’informations fiables stimule l’envie de communiquer encore plus. Un exemple : Quand on vous annonce que vous allez subir une chimiothérapie, on vous rassure sur les soins qui vont vous être prodigués pour éviter la chute des cheveux ou des ongles, on ne vous parle pas de l’intensité de la douleur que vous allez subir. Un malade n’a pas le droit de se préparer à souffrir. Alors, c’est peut-être un peu cruel, un peu cru, mais j’ai tellement cherché d’information à ce sujet que quand je l’ai vécu, il fallait que je donne mon point de vue, il fallait que je partage. J’ai vécu cette douleur et je peux lui donner des mots, d’autres la vivront différemment, je ne fais pas de mon cas une généralité, j’essaye simplement de donner  un avis et de provoquer des échanges.

Est-ce que ce blogue est essentiel dans votre cheminement avec la maladie? Comment?
Oui ce blog est devenu indispensable dans le cheminement de la maladie. Quand vous rédigez une information sur un nouveau traitement et que vous êtes malade, le respect de vos lecteurs passe par l’exigence de la qualité de la recherche d’informations. Je lis beaucoup plus que je n’écris et je lis beaucoup de fausses informations, d’idées reçues ou de propositions de charlatans.
Je prends cette richesse documentaire pour moi autant que pour mes lecteurs.
Toutes les informations sur le cancer de la prostate sont parcellaires ou axées sur la définition de la maladie. La réalité est qu’il y a aujourd’hui beaucoup plus de zones obscures que de solutions. Il n’y a que des suspicions sur les causes et nous n’en sommes qu’aux prémisses dans les issues curatives.
Le médicament que je prends aujourd’hui, le Zytiga, m’a été présenté comme la solution miracle qui s’attaque directement aux cellules cancéreuses. En fait, c’est une solution qui permet de repousser de quelques mois l’issue fatale dans la plupart des cas. La rigueur que j’essaye d’avoir dans la sélection de mes sources d’information me permet malgré tout de garder de l’espoir. Le blog m’aide à espérer une issue favorable.

Qu'en retirez-vous (échanges avec d'autres malades, soutien…)?
L’ambition première de ce blog a toujours été de favoriser les échanges avec d’autres malades, mais échanges, il n’y en a pas ou peu. Vous pourrez constater qu’il y a très peu de commentaires, je ne reçois pas plus de mail, pourtant le blog a une fréquentation d’environ 150 connexions par jour.
Les visiteurs lisent, reviennent et repartent.
Ce n’est pas spécifique à mon blog. J’ai communiqué sur d’autres blogs ou forums comme Carenity où le médiateur rédige plus que les membres ou plus proche de vous « Vivre ma mort » le blog d’un malade au Canada avec qui j’ai pu avoir des échanges.

Vous aide-t-il à côtoyer ou apprivoiser vos peurs?
Ecrire aide énormément à côtoyer ses peurs. La particularité de l’écriture est l’obligation de s’appliquer à être le plus compréhensible par le plus grand nombre de lecteurs. Quand vous soignez le style ou l’expression, vous êtes au cœur de votre propos, vous tutoyez la maladie et de fait vous démystifiez énormément la peur. Le mot cancer représente la mort pour un grand nombre d’entre nous, pour moi c’est avant tout un combat et tant qu’il y a combat, il n’y a pas de perdant. L’apprivoiser, non ce n’est pas possible. La peur reste au coin de la rue et peut ressurgir n’importe quand. Cette maladie provoque des moments de fatigue qui sont parfois très dur à gérer. L’écriture aide à sortir peut être un peu plus facilement de ces moments.

6. Selon vous, pourquoi dénombre-t-on si peu de blogues sur le cancer de la prostate ?
Jusqu’à maintenant cette maladie touchait les personnes âgées donc peu habitués à la culture web. Aujourd’hui, de plus en plus de personnes entre 40 et 45 ans sont touchées, ce n’est pas pour autant que la communication sous forme de blog va augmenter. Cette maladie touche à l’intime, tous les malade du cancer de la prostate sont traités au minimum par des injections d’hormones, ce qui anile la libido et rend les hommes impuissants, rien que pour ça, vous ne trouverez pas grand monde qui accepte d’en parler, ensuite viens se rajouter tous les effets secondaires, fuites urinaires ou même incontinence pour certains malades. Sans raisons apparentes il y a une forme de culpabilité chez les malades. En France, un délinquant sexuel qui est condamné, subira ce qu’on appelle une castration chimique pour éviter les récidives, c’est le même traitement qui est injecté aux malades du cancer de la prostate, sous un autre nom.

2 commentaires :

  1. bonjour on vient de me découvrir un cancer merci pour ce blog

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  2. Pareil pour moi, voir mon parcours médical sur https://focatrip.com/cancer-de-la-prostate/

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