Le catalogue des douleurs.

26 Juillet 2017

Hill en traduction intégrale signifie colline, alors, du haut de mon Hill Rom, nom du lit sur lequel je passe le plus clair de mon temps en ce moment je vais essayer de vous expliquer certaines notions de douleurs qui pour les médecins dans leur interprétation sont importante.

C’est un peu comme dans la fameuse pièce avec Louis Jouvet qui interprétait le rôle du Dr. Knock et avait une réplique qui disait : "ça vous gratouille ou ça vous chatouille".

La précision du ressenti de la douleur a ça d’important que, selon un détail insignifiant, elle va permettre au médecin de définir la molécule précise qui soulagera vos souffrances.

Si je ressors de ce séjour d’hospitalisation vers la fin de semaine, ce sera au moins avec le bénéfice de la compréhension de cette notion.

Je suis rentré ici en gémissant sur ma douleur et en disant à l’interne de service : "j’ai mal".
Avec une telle précision, je ne m’étonne pas après réflexion de l’imprécision de son intervention. J’ai conservé cette douleur tout le week-end, jusqu’au moment où une autre interne a bien voulu passer le temps qu’il fallait pour structurer mes propos.

J’ai parlé brièvement hier de mes différentes douleurs que j’avais classé en trois catégories, et qui vous le lirez plus loin peuvent se diviser en quatre. Là, vous êtes gâté, parce que deux articles en deux jours après un mois de silence relève de l’exploit.

Nous avons donc identifié quatre types de douleurs.

La douleur pathologique, elle est dite chronique, lorsque la sensation douloureuse excède trois mois et devient récurrente. C’est par définition, la douleur créée par votre maladie. Dans notre cas ce sont les douleurs liées aux métastases osseuses qui s’estompent par des injections de Morphine à plus ou moins forte dose. La solution à un stade très avancé comme le mien est la pompe à morphine qui permet au médecin de régler un dosage récurent et permet au patient d’ajouter des injections supplémentaires en fonction de ses besoins et de son ressenti. Sur le principe, il ne faut pas attendre que la douleur s’installe pour lancer une dose de plus (appelé Bolus), il faut anticiper cette douleur et lancer l’injection le plus tôt.

La douleur musculaire, ou myalgie est une souffrance physique désagréable et pénible située au niveau des muscles striés. Dans le cas d’un cancer à un stade avancé, il y a très souvent un phénomène de perte de masse musculaire. Le muscle est un organe qui assure les mouvements de chaque partie de notre corps. Les muscles striés ou squelettiques qui s’insèrent sur les os et la peau, sont ceux qui vont créer ce type de douleur, à cause de leur dégradation, ils ne pourront assurer les mouvements quotidiens sans forcer au point de générer des douleurs (crampes et courbatures). Les médicaments antalgiques, ibuprofène, na proxène ou le paracétamol peuvent être efficace. Ici, ils utilisent la molécule thiocolchicoside qui est un dérivé semi-synthétique de la colchicine, il est utilisé comme médicament myorelaxant, sous les noms commerciaux Coltramyl et Miorel, par exemple.

Les douleurs inflammatoires, qui recouvrent toutes les douleurs associées aux phénomènes d’inflammation (il s’agit souvent de douleurs articulaires). Les mécanismes de ces douleurs sont encore mal connus. La molécule la plus efficace pour lutter contre ces douleurs est le kétoprophène. Cette molécule est particulièrement agressive pour les troubles digestifs (ulcères, hémorragies, surtout chez les personnes âgées), maux de ventre, nausées, vomissements, diarrhées, gaz, constipation, exacerbation de pathologies telles que la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique. Il est donc primordial d’associer la prise de ces médicament à de l'oméprazole qui est une substance de la famille des inhibiteurs de la pompe à protons qui réduit la sécrétion acide de l'estomac.

Les douleurs neuropathiques (ou encore appelées douleurs neurogènes) sont considérées comme des douleurs chroniques. Elles sont provoquées par la lésion ou l'irritation d'une structure nerveuse centrale ou périphérique, ou un dysfonctionnement. La douleur est épuisante... mais elle empêche également de se reposer. Dans le cas présent ceux sont les douleurs que génèrent mes œdèmes, douleurs qui vont des picotements jusqu’aux sensations de brulures. Quand les pieds sont enflés au maximum de la tension de l’épiderme, la perception de marcher sur des braises est assez proche de la réalité.

Voilà un petit résumé du cocktail de douleurs qui m’accompagne ou plutôt qui m’ont accompagné avant la prise en charge par l’ICM.

Tout n’est pas réglé de façon optimale, il faut se donner du temps pour définir les posologies. Personne ne réagira de la même façon et bien évidement il ne faut pas négliger les effets secondaires.

La morphine ne résout pas tous les maux.

25 Juillet 2017

Dans les précédents messages, j’exprimai au travers de mon parcours de soins palliatifs, la gestion de la douleur en m’appuyant essentiellement sur les douleurs pathologiques liées à la maladie et plus particulièrement aux métastases qui à ce stade sont bien présentes.

La pompe à morphine est d’un grand confort et permet, au fur et à mesure que la souffrance devient plus intrusive et fréquente, d’ajuster les dosages et donc de répondre rapidement à ce besoin de confort.

Au bout de quelques semaines, je me suis rendu compte que certaines douleurs persistaient, même avec une forte dose de morphine. En effet, il y a plusieurs origines de douleurs dont un grand nombre ne sont pas résolues avec de la morphine.

Pour faire court, j’ai identifié 3 types de douleurs. La douleur pathologique, liée à la maladie, la douleur neuropathique et enfin l’inflammatoire. A chaque douleur sa molécule.

Cette constatation s’est faite comme par hasard un vendredi soir, lors d’une crise qui m’obligea à contacter l’hôpital pour une prise en charge. Et avec un peu de chance sur la disponibilité des lits, nous voilà reparti pour un petit séjour au sein de l’établissement de lutte contre le cancer de Montpellier.
J'ai eu des pics de douleurs à cause des œdèmes aux jambes qui aux dires des médecins ne sont pas dans la liste des problèmes que l’on peut résoudre. Enfin pour ce que j’ai compris, il faut faire avec…

Pris en charge par une interne qui m'a changé de molécules et donc arrêté la pca avec la morphine.
J'ai mis un bout de temps à comprendre que ce changement n'apportait rien en amélioration de douleurs

En insistant un peu, j'ai obtenu qu'on me remette la pca avec la morphine et que les autres douleurs neuropathiques ou inflammatoires soient traités de façon ciblé.

Pour le moment je reste hospitalisé en observation pour stabiliser tout ça. Je reprends ma position de patient dans tous les sens du terme. C’est un point particulièrement sensible que ce statut de patient qui entraine avec lui tous les accompagnants dans cette situation.

Je passe le plus clair de mon temps à répondre "je ne sais pas", à chaque interlocuteur qui prend de mes nouvelles ou veut simplement des informations, pour savoir, pour ne plus douter de ces non-dits, pour garder cette confiance envers ces toubibs qui ont plus de regards incertains que de réponses fermes.

Il est possible aussi de pousser cette patience jusqu’à faire abstraction des non-dits, et s’en tenir à espérer que ce qui a été dit soit tenu. Je devrais avoir des séances de kiné, je n’en entends plus parler et n’ai vu personne. Je devrais bénéficier de séance d’hypnose avec une personne que j’ai croisé une fois au sein de l’hôpital et qui pour le moment a disparu. Il faudrait peut-être que je note ou que j’enregistre tout ce que me proposent ces internes pour exiger ensuite de les obtenir.

C’est peut-être la colère qui s’exprime, mais force est de constater que tout fonctionne avec un manque cruel de synchronisation et une réactivité qui ne colle pas aux définitions que j’attache à ces mots.

Je reste convaincu que la médecine peut encore m’aider à améliorer le confort quotidien et me prolonger un peu cette vie que je sens de plus en plus incertaine avec leur façon de faire qui est celle de personnes qui baissent les bras.