Fatigué de mon cancer

03 juin 2013

La fatigue est surement le problème le plus impactant de la vie d’un malade du cancer, c’est également le problème le plus rependu et le plus connu des médecins malgré le fait qu’il ne le traite pas la plupart du temps.

J’ai un mal fou à me concentrer, ce n’est pas nouveau, ça va beaucoup mieux que pendant la chimio, mais j’ai réellement un mal fou à me concentrer. La différence par rapport à la période où tout allait à la dérive, c’est que maintenant, j’en suis conscient. Je passe ma journée avant chaque action à me dire :  « fait attention à ne pas faire de conneries », et boum, ça me tombe dessus le temps de le dire. Je casse, j’abîme, je fais tomber, je perds, j’oublie, je n’ai pas assez de verbes sous la main pour vous faire comprendre ce qui ce passe. Mes proches, eux, l’ont bien perçu, je le vois bien dans leurs regards complaisants, ça arrive trop souvent pour être le fruit du hasard.

Quand on vit avec un cancer, on a en permanence dans ses pensées le doute sur la finalité et sur les souffrances à venir, attitude proche de la dépression. Si tous ceux qui me croient fort face à la maladie se rendaient compte à quel point cette coque est fragile. La fatigue accroit ce phénomène et le bateau prend l’eau de toutes parts. J’ai tout le temps de ruminer mes idées noires puisque je passe le plus clair de mes nuits à lutter contre l’insomnie, j’ai tout le temps de remâcher mes pensées négatives puisque je passe le plus clair de mes jours à regarder sombrer mon entreprise.

Sur un plan purement médical, le taux de PSA baisse régulièrement et vu de l’extérieur, on pourrait penser que la maladie régresse. Je suis le premier à me réjouir des effets plutôt positifs de ce traitement par rapport à d’autres « expériences », pourtant sur un plan purement personnel, je me sens de moins en moins bien et de plus en plus faible, j’ai l’impression de partir un peu.
De toute ma vie, je ne me suis jamais senti aussi fragile face à un adversaire, d’ailleurs, il est faux de le qualifier d’adversaire, il n’est pas face à moi, il fait partie de mon être et prend les commandes régulièrement, et les chemins qu’il nous fait parcourir sont épuisants.

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